Critique musicale : Scott Pilgrim vs. The World: The Game

Cela fait bien long­temps que je n’avais pas rédigé de cri­ti­que dans notre série Les meilleu­res ban­des ori­gi­na­les de jeux. Allez savoir pour­quoi ; ce n’est pas l’ins­pi­ra­tion qui man­que, pour­tant. Bref.

En signant sa pre­mière bande ori­gi­nale, avec l’excel­lente adap­ta­tion con­jointe en jeu vidéo du comic book Scott Pil­grim et du film qui en découle (vous sui­vez tou­jours ?), Ana­ma­na­gu­chi fait un car­ton plein. Le groupe signe ici une BO équi­li­brée et qui vous fou­tra une pêche d’enfer. Lit­té­ra­le­ment !

Ah-nah-mah-nah-guh-chie

La for­ma­tion new-yor­kaise n’était pas néces­sai­re­ment des­ti­née à com­po­ser une bande ori­gi­nale de jeu vidéo. A l’ori­gine, elle s’ins­crit dans la mou­vance de ces grou­pes rock mâti­nés de chip­tune, qui à la clas­si­que for­ma­tion bat­te­rie + gui­ta­res + basse ajou­tent sur scène une NES ou une Game Boy. Tou­te­fois, Ana­ma­na­gu­chi s’éloi­gne quel­que peu du genre Nin­ten­do­core (terme créé et popu­la­risé par le groupe Horse The Band) en pro­po­sant des com­po­si­tions moins metal­leu­ses, plus… power pop. Ses prin­ci­pa­les sour­ces d’ins­pi­ra­tion ? Les Beach Boys, ou Wee­zer…

En embau­chant ces petits gars pour sono­ri­ser l’adap­ta­tion de Scott Pil­grim sur con­so­les, le moins qu’on puisse dire, c’est que les équi­pes d’Ubi­soft ont été bien ins­pi­rées. Loin de se con­ten­ter du strict mini­mum et d’empo­cher le chè­que sans con­vic­tion, Ana­ma­na­gu­chi fout ses tri­pes dans cette BO et livre un résul­tat final par­ti­cu­liè­re­ment varié, y com­pris dans des sty­les inat­ten­dus…

Dans le détail

Dès l’ouver­ture, on est con­quis : le fameux Scott Pil­grim Anthem, qui sert d’écran-titre au jeu, donne tout de suite le ton. Une courte intro très chip­tune laisse rapi­de­ment place à un rythme impa­ra­ble et où ça riffe bien comme il faut : le mor­ceau est assez mélo­di­que, plus qu’à l’accou­tu­mée pour le groupe (il fera plu­tôt pen­ser à leur titre Mer­maid : il est à part), con­tient un break de per­cus à la sauce NES, des accords pres­que mélan­co­li­ques… en même pas 2 minu­tes, il donne le ton.

C’est évi­dem­ment l’extrait pre­view qu’on a choisi de vous faire écou­ter :


Ana­ma­na­gu­chi – Scott Pil­grim anthem

Dans l’ensem­ble, ce cou­lis 8-bit est le véri­ta­ble liant de cet album, qui joue par ailleurs la carte de la variété. L’unité dans la diver­sité est donc assu­rée sans grands efforts. Comme quoi, quel­ques piou-bip-bip font sou­vent des mira­cles, mais ça, à Café Gaming, on ne cesse de vous le dire !

On retien­dra avant tout cet album pour ses mor­ceaux mid-tempo gen­ti­ment aci­du­lés, accom­pa­gnant géné­ra­le­ment les niveaux les plus sim­ples ou les plus cal­mes, ainsi que les (cour­tes) cuts­ce­nes ponc­tuant le jeu : Ano­ther Win­ter, Subur­ban Tram, Leave The Past Behind, Just Like In The Movies, This Is The End… Ana­ma­na­gu­chi explore une facette de son talent qu’on ne lui con­nais­sait pas, sans doute plus dif­fi­cile à met­tre en valeur sur des pro­jets solo mais ô com­bien adap­tés à une bande ori­gi­nale. L’esprit Scott Pil­grim, qu’on ait ou non aimé l’adap­ta­tion ciné­ma­to­gra­phi­que (bande de grin­cheux), est bien là.

L’uni­vers tra­versé dans le jeu étant doté de son lot de cari­ca­tu­res, le groupe se per­met quel­ques exer­ci­ces de style et tou­che à tous les gen­res. Le génial Bol­ly­wood verse dans le sté­réo­type elec­tro/techno éner­gi­que, loin d’être dégueu ; Skate Or Live sonne comme une paro­die de punk rock ricain déjanté ; Cheap Shop, qu’on croit 100% chip­tune dans un pre­mier temps, expé­ri­mente le mariage NES + gui­tare acous­ti­que (!) de fort belle façon…

Et que dire des thè­mes de boss ! Fai­sant lit­té­ra­le­ment péter les bas­ses com­pres­sées, ceux-ci évo­quent les meilleu­res heu­res de Mega Man, le tout boosté à la gui­tare élec­tri­que avec une pro­duc­tion qui tire plei­ne­ment parti des sono­ri­tés moder­nes. Les ama­teurs du bon­homme en armure bleue de Cap­com com­pren­dront, à la sim­ple évo­ca­tion des thè­mes les plus mythi­ques de la NES, qu’on a affaire à du haut level. Le Sub-boss theme frappe fort avec un tempo furieux, tan­dis que The Dark One joue dans un regis­tre plus grave, plus lourd, repre­nant même le thème prin­ci­pal de Scott Pil­grim en leit­mo­tiv. C’est du gras, qu’on vous dit !

En fin de compte, dur de pren­dre cet album en défaut ; la variété impo­sée par l’uni­vers du jeu force Ana­ma­na­gu­chi à se renou­ve­ler au tra­vers des mor­ceaux, et ce der­nier ne man­que de toute façon pas du talent néces­saire pour ne pas ver­ser dans la répé­ti­tion. C’est à peine si on osera faire remar­quer que quel­ques thè­mes sont plus mal­heu­reux que d’autres : je pense notam­ment à Maki Ya, ou Come On Down, un cran en-des­sous du niveau géné­ral. Heu­reu­se­ment, ces titres demeu­rent mino­ri­tai­res et on n’en tien­dra abso­lu­ment pas rigueur au groupe, vu le nom­bre de pis­tes pro­po­sées au total, plus que con­sé­quent (24). Peut-être pourra-t-on ergo­ter sur l’absence de quel­ques thè­mes bien sym­pa­thi­ques pour­tant pré­sents dans le jeu, tels la musi­que de la carte ou le med­ley final…

Où l’écou­ter…

La bande ori­gi­nale de Scott Pil­grim vs. The World: The Game a récem­ment été mise en vente, en ver­sion déma­té­ria­li­sée uni­que­ment. Mal­heu­reu­se­ment, et mal­gré les ten­ta­ti­ves déses­pé­rées du groupe en ce sens, celle-ci reste réser­vée à une poi­gnée de pays et est indis­po­ni­ble sur l’iTu­nes Store fran­çais jusqu’à pré­sent. En atten­dant son arri­vée à la vente, plu­tôt que de vous con­seiller de vous jeter sur votre réseau peer-to-peer pré­féré, on peut tou­jours vous redi­ri­ger vers la pre­mière sor­tie du groupe, l’EP Power Sup­ply, télé­char­gea­ble gra­tui­te­ment sur le site de 8bit­peo­ples, tan­dis que le plus récent Dawn Metro­po­lis et plu­sieurs sin­gles sont pro­po­sés à l’écoute sur le site offi­ciel du groupe.

Mise à jour : on me souf­fle que l’album est désor­mais dis­po­ni­ble sur l’iTu­nes Store France !

Bonne(s) écoute(s), en atten­dant la pro­chaine chro­ni­que (qui tar­dera moins, pro­mis) !

Anne Ferret

J'ai créé Café Gaming lors d'un moment d'égarement, il y a bien trop longtemps. J’aime SEGA, Tetsuya Mizuguchi et Rock Band ; je fais de la musique sous le pseudonyme Lucifer Cedex.

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